Réduction des subventions

Publié le par SEP (Syndicat de l'Education Populaire)



Freinet, vivant et menacé


Paru dans l'Humanité du 3 septembre



En dépit de la pénurie budgétaire, le mouvement coopératif de l’école moderne manifeste toujours sa grande vitalité pédagogique


Il est bien vivant, le mouvement Freinet ! Plus de six cents participants venus d’une quinzaine de pays pourraient en témoigner, qui se sont retrouvés récemment à Paris (1) à l’occasion du 48e congrès de l’ICEM (Institut coopératif de l’école moderne). Un véritable bouillonnement d’ateliers et de rencontres par lequel s’entretient la vigueur des principes de la pédagogie inaugurée par Célestin Freinet, au début du siècle dernier. Le pédagogue et ses successeurs s’étaient attachés à faire de leurs classes hétérogènes des milieux de vie organisés pour libérer l’élève, en donnant au travail son rôle de geste créateur, vivant et personnel, en favorisant l’auto-organisation des apprentissages et des règles de vie par les enfants eux-mêmes.


Affirmation d’une ouverture de l’école primaire sur le monde, « nous rejetons l’illusion d’une éducation qui se suffirait à elle-même hors des grands courants sociaux et politiques qui la conditionnent », souligne la Charte de l’école moderne. On retrouve cette inspiration dans nombre de travaux en cours dont le congrès s’est d’ailleurs fait l’écho : qu’il s’agisse du tâtonnement expérimental, de la correspondance scolaire, de l’esperanto, de la méthode naturelle en lecture, des créations mathématiques, des ateliers de philosophie pour enfants et de bien d’autres recherches, dont certaines scènes de classe filmées constituent un remarquable matériau de réflexion collective. Avec ses groupes départementaux et ses chantiers de recherche qu’animent ses trois mille membres, le mouvement Freinet rassemble aujourd’hui une riche expérience d’intervention contre l’échec et l’ennui scolaires.


Et pourtant le mouvement est en butte à des difficultés liées à une baisse significative des subventions de tous les gouvernements depuis 2002. Bien qu’agréé par les ministères de l’Éducation nationale et de la Jeunesse et des Sports, l’ICEM a vu sa subvention diminuer de moitié. D’où des difficultés qui ont contribué à la liquidation de la société d’édition qui publiait des outils de grande qualité (revues, livres, fichiers pour les classes, cédéroms, DVD…) et qui est dans l’attente d’un repreneur. Sous couvert de la recherche d’une plus grande efficacité dans la répartition des subventions aux associations, les ministres de l’Éducation de droite successifs ont même réduit les mises à disposition en personnel accordées à l’ICEM. Les associations d’éducation populaire sont dans le collimateur du gouvernement, souligne Catherine Chabrun, l’une des animatrices de l’association. L’éducation à la citoyenneté et l’intégration sociale sont mises sous la tutelle du ministère de l’Intérieur, le soutien scolaire livré à des organismes commerciaux comme les séjours de vacances ou les outils et matériel pédagogiques. C’est sans compter la force de ce mouvement dont les principes et la visée éminemment culturelle et sociale ne peuvent être réduits à coups de baisses de subventions. Les enseignants du mouvement Freinet continuent de s’engager pour une école autre dans une société différente.


(1) Du 17 au 20 août.

Nicolas Mathey

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